Asphodèle a collecté pour les Plumes de l’Année les mots en N que voici :
nouvelle – notoire – nigaud(e) – nature – nuance – nacelle – neutre – noix – naufragé(e) – nuage – nirvana – nana – nymphéa(s) – nouille – noble – noise – nitrate – nenni – noctambule – neuf – nougat.
Et voici mon texte…
Le Nirvana Domestique. Acte II Scène 4
Elle entre dans le salon dans un frou-frou de dentelles. Il lit son journal. Elle soupire et s’assoit en face de lui.
– Mais qui m’a donné une pareille nigaude?
– Que se passe-t-il donc, ma chère Aliénor?
– Mon ami, c’est cette nouvelle bonne que votre cousine de Pontivy nous a envoyée. Pardonnez-moi, mais je n’ai jamais vu une telle nouille! Ces petites bretonnes sont vraiment des sauvages… C’est un fait notoire!
– Qu’a-t-elle donc commis comme vil péché pour vous mettre dans cet état, ma mie?
– Elle a confondu le nougat et le savon. Je ne vous dis pas l’état des draps maintenant…
– Mais ma chère, c’est sans doute que vous lui aurez mal expliqué ses tâches. C’est votre devoir, votre noble devoir, d’élever cette rustre nature vers le nirvana domestique!
– Voilà, vous me cherchez encore noise, mon ami! Quoi que je fasse, ce n’est jamais comme il faut. Rappelez-vous l’affaire des nitrates…
– Nenni, ma tendre amie… Loin de moi l’idée de vous critiquer et cette histoire de nitrate est, je vous l’assure, depuis longtemps oubliée… Mais je suis votre mari et je dois faire avec vous comme vous avec cette petite Marie-Louise. Vous élever, ma chère, vous éduquer! Et puis n’oubliez pas que cette jeune fille a vécu un drame terrible, son père était sur le bateau naufragé, pillé par les pirates, on aurait les idées chamboulées à moins…
– Vous, ce qui vous chamboule, c’est son petit caraco couleur de nuage et son minois tout neuf…
– Allons bon, la jalousie maintenant. Vous êtes terrible Aliénor. Mais je n’irai pas sur ce terrain glissant avec vous. Dans cette affaire, j’ai décidé de rester neutre…
– On ne peut pas rester neutre quand on est partie prenante!
– Savez-vous que vous commencer à me casser les noix, Aliénor? Pourquoi n’allez-vous pas plutôt vous occuper de votre jardin, contempler vos précieux nymphéas pour ensuite, sur vos toiles, en restituer toutes les nuances, ainsi que le fait Monsieur Monet?
– Bien sûr et tandis que toute la nuit, je travaillerai dans mon atelier, vous pourrez jouer les noctambules et aller contribuer à l’élévation domestique de cette… de cette… nana! Si tant est que vous soyez capable de faire découvrir à une pauvresse dans son genre un quelconque nirvana!
– Que voulez-vous dire?
– Que pour monter au septième ciel, je compte bien plus sur la nacelle d’une montgolfière que sur vos qualités d’amant, mon ami!
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« Vous éduquer » ? Eh oui, tout comme la femme doit obéissance à l’homme !
Belle idée que le dialogue théâtral.
@ Olivia : un petit dialogue, ça change, c’est vrai… Aliénor est en position d’infériorité mais elle a la langue bien pendue et ne se laisse pas faire…
J’adore ce dialogue bien senti, percutant, j’ai éclaté de rire pour la confusion nougat/savon, j’adore l’expression « ma mie » désuète à souhait, merci pour ce bon moment.
@ Manuel : merci beaucoup! 🙂 Ça m’a amusé de faire ce dialogue d’un autre âge…
Une belle scène d’Histoire, presque !
Merci pour ton lien, je t’ai donc retrouvée !
En effet, manger du savon et faire la lessive avec du nougat, c’est un peu nigaud 🙂
Bises de Lyon
@ Soène : ah oui, ça sent son XIXème siècle à plein nez… J’aime bien ce petit côté désuet. Nougat/savon, c’est un peu n’importe quoi mais il fallait bien le caser, ce truc!
Mais j’ai adoré savon-nougat ! c’était pour rire ! c’est pas nigaud du tout, une belle Ninspiration, au contraire 🙂
@ Soène : 😀
Il règne dans ton texte un délicieux parfum de percale et de lavande, comme un vieux corset emballé depuis un siècle dans du papier de soie. J’adore!
@ Célestine : merci. C’est exactement comme tu le dis… Lavande, cigare et monocle… 😆
Très joliment fait et fin… sauf la fin bien sûr ! 😀 J’ai bien aimé ce dialogue, bravo !
Merci! Je me suis bien amusée en l’écrivant, moi aussi!
Oui on le devine. 😉
bien beau dialogue où l’humour est convoqué avec finesse.
à tantôt
@Lilou : merci! C’était une série de mots plutôt facile…
Une fin au sommet pour un dialogue théâtral bien enlevé ! Bravo
coincoins rideau
@ Elcanardo : merci… elle ne lui vole pas dans les plumes, mais presque! 😉
Elle n’a pas sa langue dans sa poche Alienor 😉 et c’est tant mieux 🙂
Mais la phrase « ces petites bretonnes sont vraiment des sauvages …. » Est ce bien toi qui l’a écrit ? Ou ton blog a t il été piraté ?
@ Valentyne : connaissant le mauvais esprit wensien, j’ai préféré lui couper l’herbe sous le pied! 😉
Belle scène de « ménage » d’un autre temps… Bravo pour les trouvaille, la confusion entre le nougat et le savon m’a bien fait rire!
@ Bettina : ce petit goût suranné m’a bien plu… 😉
complètement fan de ton texte, bravo !!!!
@ Lucie : merci beaucoup ! 🙂
dire que j’ai de la famille à Pontivy !
je ne leur en parlerai pas, promis !
la scène est vraiment très « visuelle »
bravo
@ Anne : désolée pour les cousins de Pontivy qui est une région superbe, pleine de paysages enchanteurs! Merci pour ton passage ici.
Mamma mia, c’est génial, bravo !
Solange
@ Solange : merci! Un peu de génie dès le matin, ça fait du bien… 😉
Merci pour le conseil du lavage de draps au nougat. J’ai bien envie d’essayer. 😉 Ton texte est savoureux, en tous cas. 😀
@ Cériat : les noisettes et les amandes, ça exfolie! 😉 Merci à toi. 😀
L’ a de la répartie quand même, Aliénor!
@ Pierrot Bâton : elle se débrouille… 😉